Plusieurs incendies criminels ont détruit des installations et du matériel appartenant à des entreprises de traitement et de transport des déchets. Racket ou règlements de comptes pour le contrôle de marchés publics? L’ombre des clans mafieux plane sur le secteur des déchets. Quatre camions de ramassage des ordures incendiés à Monticello; un centre de tri des déchets ravagé par les flammes; six camions de la société Rocca Transports détruits par le feu… Les incendies criminels se sont multipliés ces derniers mois en Corse dans le secteur de la collecte, du transport et du traitement des déchets ménagers.
ette violence à bas bruit, qui ne fait pas couler de sang et ne donne lieu qu’à de courts articles dans les médias locaux, est pourtant en train de prendre des proportions alarmantes. La Corse ressemblera-t-elle bientôt à Naples? Le dernier incendie en date a visé les installations d’AM Environnement, la seule plateforme de tri des déchets ménagers existante dans l’île. Sur ce site de 14hectares, à Biguglia, dans une zone industrielle au sud de Bastia, sont traités depuis 15ans les produits de la collecte sélective: plastiques, cartons, bois, fer, mobilier, électroménager… Les matières valorisables sont triées, emballées et expédiées par camion et bateau sur le continent, en France ou en Italie, pour y être recyclées.
Le 22 mars, dans la soirée, après le départ des ouvriers, le feu a pris dans un hangar rempli de déchets d’ameublement. Le propriétaire du site, Ange Moracchini, alerté par un voisin, a pu prévenir rapidement les pompiers. Mais plusieurs tonnes de fauteuils et de matelas ont été calcinées avant que l’incendie puisse être maîtrisé. La piste criminelle est privilégiée par les enquêteurs, à qui Ange Moracchini a remis les enregistrements de ses caméras de vidéosurveillance. Elle est d’autant plus probable que l’entreprise en a déjà été victime. En juillet 2017, ses installations ont été gravement endommagées par un premier incendie, spectaculaire, provoqué par plusieurs mises à feu simultanées, dans différentes zones de la plateforme, et que les pompiers ont mis des heures à circonscrire. «La remise en état m’a coûté plus d’un million d’euros et maintenant, aucune compagnie d’assurance n’accepte de nous assurer», déplore Ange Moracchini. L’enquête judiciaire ouverte par le parquet de Bastia à la suite de l’incendie de 2017, confiée à la gendarmerie, n’a donné aucun résultat.